27/07/2013
Fin de partie pour Le Pont des Artistes
Ballade en Si bémol
La vie est une douche écossaise
Et ça dit bien ce que ça veut dire
Sitôt qu'une chose vous fait plaisir
Faut qu'il y en ait une qui vous déplaise !
Mais bien que ce soit à mon avis
Comme une espèce de complot
On ne peut pas passer sa vie à s'foutre à l'eau.
Le Si bémol est un accord qui porte une certaine désespérance élégante. Un regard distancié sur les avanies de la vie et du destin. Sans framboises.
Mouloudji a toujours eu ce regard doux amer, mais aujourd'hui il pourrait chanter,
Chanter, chanter des fois ça m´fout l´cafard
Chanter, chanter des fois ça m´fout l´cafard
Le Pont des Artistes avec les Primitifs du Futur (photo ©NGabriel)
La nouvelle est tombée, Le Pont des Artistes se sera pas à l'antenne à la rentrée 2013. La direction ayant esquissé plusieurs promesses d'offre musicale élargie avec des concerts en live avec public, on expédie aux archives une émission qui depuis 25 ans propose des concerts en live avec public. Logique !
On pouvait y entendre des genres musicaux très différents, une fenêtre ouverte sur le spectacle vivant, avec à la barre quelqu'un qui connait très bien le monde de la musique, on pouvait … Nous espérons donc que dans cette opération d'antenne et de programmes en rénovation , la musique aura un espace avec … des genres musicaux très différents, une fenêtre ouverte sur le spectacle vivant, avec à la barre quelqu'un qui connait très bien le monde de la musique. Ou bien aurais-je raté quelque chose ? Ou bien la scène de la chanson se serait soudain transformée au point qu'il devienne nécessaire de refaire les peintures dans un grand balayage de rentrée, juste pour l'illusion d'un changement ? L'intérim en juin avec une voix nouvelle nous a donné la surprenante impression d'avoir glissé par inadvertance sur une radio commerciale avec un animateur bateleur très décalé -euphémisme- sur Radio France.
(En juin Isabelle Dhordain a dû interrompre pour raison de santé)
Naguère, Pollen a disparu pour la simple raison de la limite d'âge de son capitaine. Ce fut une perte sèche pour la scène chanson, puisqu'aucun programme n'a remplacé sous aucune forme que ce soit les soirées Pollen. Et comme toujours dans ces cas-là, une petite troupe de ronchonchons ont sonné un tocsin inutile. Auditeurs sachez auditer, mais fermez-là, il n'y a personne pour vous écouter. Au mieux, ou au pire, vous pouvez essayer d'écouter ailleurs. Depuis quelques années internet vous offre une pléïade de radios de tous les pays du monde. Le pire n'est jamais sûr, mais quand un mauvais coup arrive au creux de l'été, ça laisse un arrière goût aigre. Evidemment qu'annoncer en juin que les émissions « Sous les étoiles » « Black list » et « le Pont des Artistes » passaient à la trappe, ça faisait beaucoup. Trop.
Epilogue ?
Le drame il faut savoir y tenir sa partie et même qu´une voix se taise
Sachez-le toujours le chœur profond reprend la phrase interrompue
Du moment que jusqu´au bout de lui-même. Le chanteur a fait ce qu´il a pu
Qu´importe si chemin faisant vous allez m´abandonner comme une hypothèse
Avec l'amicale participation de Mouloudji, Allain Leprest, Aragon et Ferrat, salut à Isabelle Dhordain.
La ballade en Si bémol, c'est là :
01:07 Publié dans Blog, Musique | Lien permanent | Norbert Gabriel | Commentaires (14) | Tags : france inter, isabelle dhordain, le pont des artistes, chanson; | | | Facebook | Imprimer | |
08/06/2013
Doc Caloweb et les photos...
Dans une digression entre jazzeries et blues du Delta, une histoire de photo est arrivée sur la table, entre le Jim Beam et un café amélioré façon brûlot du bayou (dans un café fort, on verse le cognac flambant dans lequel on a fait mariner les zestes d'une orange, d'un demi-citron, puis on ajoute 1/2 cuillère à café de canelle, et du sucre roux, on touille délicatement et on boit de même, c'est du hot-hot) sont venues quelques histoires de photos, celles de Jo Baker la superbe, et des d'autres plus ou moins en situation. Mais il y en avait une particulièrement savoureuse, ou scandaleuse. Avant, on a parlé de la guitare de Django, celle qu'on voit très souvent, et qu'il n'a pratiquement jamais utilisée.
Consultons notre expert, Duke Paddington.
Depuis que les disques se sont décorés d'images attractives pour le chaland, on a vu quelques belles réalisations, et quelques remarquables horreurs et/ou erreurs. En voilà déjà une, sur le plan erreur, cette image est une escroquerie, belle photo de studio, mais à ma connaissance, à part un ou deux concerts aux USA, en 1946, (dont un enregistré, le 10/11/1946) Django n'a jamais joué ou enregistré en France avec ce genre de guitare, SA guitare, c'est la Maccaferri-Selmer, dont il a testé tous les modèles, pour se fixer sur le modèle « petite bouche », que voici, ici avec un micro Stimer.
Mais les maquettistes qui font les pochettes de CD ne sont pas plus éclairés que ceux qui faisaient les décorations des 45 t ou de 33t. Ça ne manque pas d' horreurs hors sujet, avec des totales méconnaissances du propos et du contenu de l'album, témoin ce 45t qui se voulait un hommage à « Notre ami Django », avec 4 titres dans la plus pure tradition du jazz manouche, joué avec des guitares Maccaferri-Selmer, et voilà le décor choisi par un maquettiste pour qui une guitare est forcément espagnole dans le fond et la forme. Une sorte de ruine provençale ou andalouse, c'est kif-kif, pourtant le titre « Place de Broukère » c'est pas tellement méridional, mais la géographie, est-ce bien utile pour faire des illustrations sur des disques. Et « Minor Swing » ou « Djangologie » n'ont rien à voir avec les Gypsies Kings.
Mais ces anecdotes ne sont que des bricoles anodines de béotiens à côté de ce qui suit. Dans les années 60-70, apparaît une superbe chanteuse américaine, Dionne Warwick … Voici son premier 45t publié en France
Belle fille n'est ce pas ? Chez Columbia un label prestigieux, pas des amateurs rigolos... Un détail vous gêne ? La robe courte ? Elle n'a même pas de chaussures ? C'est vrai, il y a un autre menu détail qui gêne, Dionne Warwick, c'est elle :
D'où la question, dans la chaîne qui a suivi l'édition de cette pochette « The empty place » maquettiste, directeurs, chefs de ceci ou cela, aucun ne savait que Dionne n'était pas châtain-roux ? Et un peu afro-américaine... Une troupe d'imbéciles, ou alors mettre une fille trop bronzée indélébile, ça dérangeait dans ces années obscures ?
Une dernière pour la route, qui est à l'origine de ce bavardage... Voyons la pochette :
Cette pochette est un cas d'école, à part le titre qui correspond à l'esprit de la musique, on se demande ce qui a bien pu passer dans la tête du maquettiste pour mettre cette simili BB collée au mur... Mystère .. ou alors elle écoute le musicien qui serait de l'autre côté du mur ? Possible... mais le mieux est à venir, quand on lit les titres, il y en a 11... Bon. Mais quand on écoute l'album, il y a 13 plages. Etonnant non ? Et dans les deux titres qui ont disparu du générique il y a le premier, ce qui fait que pendant des années, de 1960 à 1995, on a donné des titres erronés aux airs qui figurent sur cet album. En fait, les deux titres disparus sont les premiers de chaque face.
Cet album « Henri Crolla et sa guitare" a été ré édité en 2002/2003 dans la belle collection Jazz in Paris, avec tous les titres remis à leur place, grâce aux recherches d'Alain Tercinet, on trouve les musiques de cet album dans « Le long des rues » double album qui regroupe les 3 vinyles « Le long des rues » « C'est pour toi que je joue » et « Bonsoir chérie » avec quelques bonus inédits des musiques pour le cinéma. Moments de studio rares et émouvants.
Dernier point à souligner, quand on écoute le vinyle, il est évident pour un observateur un peu mélomane que le premier titre, une sorte d'air classique romantique, ne peut être « Porte de Choisy » qui est à l'évidence le deuxième, un blues lent mélancolique, qui renvoie à l'enfance de Crolla dans la zone de la porte de Choisy. Ce que Colette Crolla a confirmé, le premier, on l'appelait « l'air de Simone » (Signoret) c'est « Ô guitare » une mélodie dans le style musique de chambre des marquises en crinoline, enfin quelque chose comme ça, rien à voir avec les musiques voyoutes du Balajo, ou des guinguettes de Nogent.
C'est dans ces guinguettes que "Rico" Crolla jouait à 12/13 ans avec le "Jazz Crolla" un petit combo familial, peut-être qu'il jouait sur son banjo ces quelques notes souriantes qui ressemblent tellement à Henri Crolla (Ici avec sa guitare, la Selmer-Maccaferri 453, que voici en personne...)
http://www.youtube.com/watch?v=ewBh3XachbI (Je cherche après Titine)
17:27 Publié dans Blog, Musique | Lien permanent | Norbert Gabriel | Commentaires (1) | Tags : henri crolla, dionne warwick, django reinhardt, selmer-maccaferri | | | Facebook | Imprimer | |
09/03/2013
Jean Ferrat, « le charme rebelle »
Depuis le 13 mars 2010, plusieurs livres nous ont raconté Ferrat, chacun apportant un regard particulier sur Jean des Encres et Jean des sources, le poète d'Antraigues sur Volane, l'humaniste battant jamais résigné qui ne capitule pas devant les disciples d'Anastasie.
Ce qui fait le charme de ce livre signé Raoul Bellaïche, c'est que le lecteur devient non plus un spectateur devant la scène, mais une sorte de compagnon de voyage qui partage un parcours commencé dans les scènes de cabarets, tout le monde le sait, mais qui est moins linéaire qu'on peut l'imaginer depuis son entrée marquante dans l'écran télé en 1961... (merci Denise Glaser) On le suit, on rencontre les copains, la famille, les camarades de scène, les amis pour la vie, et on se sent un peu de ceux-là. On croit tout connaître ou presque de Jean Ferrat, pourtant il y a encore des choses à affiner. Sur l'homme, sur l'artiste, sur son exigence, et son intransigeance dans le respect des droits moraux de l'artiste. Son dernier combat après plusieurs années de procédures judiciaires a été de faire adopter les dispositions qui donnent un droit de regard à l'auteur sur l'exploitation de son oeuvre. C'était en 2006. Eviter par exemple de voir apparaître dans une compil' « Nuit et brouillard » à côté de « Nazi rock » au motif que ces deux chansons auraient trait à une même période... .
Raoul Bellaïche est un expert méticuleux des histoires de chanson qui prend soin vérifier toutes les versions d'une anecdote. On découvrira le point de vue de Daniel Guichard sur « Mon vieux » et ça mérite attention. On voit aussi que les relations de Ferrat avec la télévision ont toujours été compliquées, y compris avec Chancel, et ne parlons pas de ce directeur qui a mis aussi Francis Lemarque au ban des écrans de la télé. Le seul à n'avoir pas eu trop de soucis sur ce plan est Drucker.
Ne faisons pas la liste de tout ce qui fait l'intérêt de ce livre, ce serait long, je retiens simplement ce sentiment d'être un témoin qui accompagne, plus qu'un lecteur distancié, et sans avoir bu un coup au bistrot de la place d'Antraigues, « Les amis de la montagne » on a dans la bouche le goût de cette horrible piquette qui faisait des centenaires à ne plus que savoir en faire.. »
C'est l'histoire, et la vie d'un chanteur, auteur, compositeur qui n'a jamais esquivé son état d'artiste embarqué dans le tourbillon des jours, pas comme un galérien asservi mais comme un marin qui choisit et tient son cap sans désemparer, résolu à traverser les intempéries vent debout s'il le faut.
Dans ta voix Galopaient des cavaliers Et les gitans étonnés
Levaient leurs yeux de bronze et d'or
Si ta voix se brisa Voilà bientôt trois ans...
Mais elle résonne toujours comme un tocsin, celui du chant des hommes.
Ce charme rebelle, c'est aussi un beau portrait de Christine Sèvres, intègre, fragile, passionnée, magnétique, interprète hors du temps, trop humaine peut-être ...
Jean Ferrat, « Le charme rebelle » par Raoul Bellaïche, Editions l'Archipel/
Pour la bande son,
http://www.jukebo.fr/jean-ferrat/clip,federico-garcia-lor...
03:18 Publié dans Blog, Musique | Lien permanent | Norbert Gabriel | Commentaires (0) | Tags : ferrat, le charme rebelle, raoul bellaiche; | | | Facebook | Imprimer | |